Alors que la gauche était divisée comme jamais il y a encore quelques semaines, elle est parvenue à un accord que certains qualifient volontiers d’historique, autour d’une candidature commune LFI-EELV-PCF-PS aux prochaines législatives, sous la bannière du NUPES (Nom Usuel Particulièrement Eclaté au Sol)
Pourtant, cet accord n’est pas nécessairement allé de soi. Si EELV, bien aidé par le fait que le secrétaire national soit Julien Bayou et non pas Yannick Jadot, et le PCF ont rejoint facilement l’union, ce fut plus difficile pour le PS.
En effet, outre la réticence de la frange la plus radicale de LFI et du NPA qui n’a finalement pas rejoint l’union, la vieille garde du PS, ceux qu’on appelle les éléphants, survivants du hollandisme ont massivement rejeté cette union. Les Hollande, Cazeneuve, Cambadélis avaient globalement le seum de voir « leur PS » se ranger derrière Mélenchon.
Pourtant ne serait-ce pas le sens de l’histoire ? Depuis près de 20 ans le PS prend des taules électorales, a délaissé les catégories populaires aux mains de l’extrême droite et a succombé aux sirènes du néo-libéralisme. La parenthèse de la présidence d’Hollande a d’ailleurs fini d’achever les idées de gauche au PS. Depuis 2012 le parti s’est effondré mais les cadres n’en ont pas tiré les leçons.
Les éléphants croient encore qu’une politique molle de centre gauche (voire carrément de droite) fait encore rêver l’électeur traditionnel de gauche. Si les électeurs historiques de gauche ont massivement plébiscité Mélenchon à la présidentielle, c’est bien car il répond à une demande de rupture, nécessaire pour répondre aux crises sociales et environnementales. A quel point un Cambadélis est-il dépassé pour croire que la ligne sociale-démocrate sauce PS représente encore un espoir, notamment pour la jeunesse ? Des électeurs qui adhèrent à cette ligne, il y en a ! Mais cela fait longtemps qu’ils sont partis chez Macron. Les 1,7 % d’Hidalgo ne sont pas qu’un simple accident. Ils montrent juste à quel point cette ligne n’attire plus. Sa compatibilité avec le macronisme la rend incapable d’attirer l’électorat historique de gauche
Et non, la NUPES n’est pas une dangereuse alliance d’extrême gauche. Elle ne fait que rebâtir la ligne que s’était fixé le congrès d’Epinay en 71, y intégrant les enjeux propres à aujourd’hui. Quand les éléphants ont eu le pouvoir entre 2012 et 2017, ils ont gouverné comme la droite. C’est donc légitime qu’ils se mettent à flipper comme le fait tout bon éditorialiste de CNEWS ou cadre des Républicains. A les écouter tous, ils sont à deux doigts de nous ressortir l’argument de 81 des chars soviétiques sur les Champs Elysées.
Donc non, la NUPES ne met en danger ni la gauche, ni la démocratie, au contraire elle va tenter de réanimer la gauche et de reconquérir les classes populaires tombées dans les griffes de l’abstentionnisme ou de l’extrême droite. Et franchement, même si ça reste de la gauche réformiste juste un poil radical, ça fait du bien au débat public, tiraillé entre une extrême droite de plus en plus extrême, et un ultra-libéralisme toujours plus ultra.
Et je ne pensais jamais vous recommander ça dans un édito, mais je vous laisse avec, ci-dessous la très bonne chronique de Patrick Cohen face à François Hollande, dans l’émission C à Vous.
Simon Bouquerel